mardi 28 février 2006
vendredi 24 février 2006
"En règle générale, il n'y a pas de miel avant le lever des Pléiades"
Aristote croyait que les abeilles fabriquaient la cire, mais que le miel tombait du ciel, comme une rosée d'étoiles.
"Le rayon de cire vient des fleurs, les abeilles apportent l'emplâtre de la larme des arbres. Le miel est ce qui tombe de l'air surtout au lever des étoiles et lorsque l'arc-en-ciel se déploie. En règle générale, il n'y a pas de miel avant le lever des Pléiades."
"Le rayon de cire vient des fleurs, les abeilles apportent l'emplâtre de la larme des arbres. Le miel est ce qui tombe de l'air surtout au lever des étoiles et lorsque l'arc-en-ciel se déploie. En règle générale, il n'y a pas de miel avant le lever des Pléiades."
jeudi 23 février 2006
Mensonge et sortilège
Il y a les livres à histoires et les livres dont les personnages sont tels que l'histoire on s'en fout, en fait ce sont eux qui la font, la créent, plus qu'ils ne la portent ou la servent. Il suffit qu'ils apparaissent et se déploient et alors l'intrigue devient vraiment secondaire quand elle n'est pas carrément rejetée en coulisse. Guerre et paix, par exemple. Les longues et ennuyeuses digressions de Tolstoi sur le destin, Napoléon, l'Histoire, etc. Non mais qu'est-ce qu'on s'en fout à côté de ce qui va arriver au prince André, à Natacha, Pierre ? Thomas Mann aussi a des personnages qui savent vivre tout seul, des gens qui deviennent aussi familiers que des proches, des voisins, Hans, Madame Chauchat, Joachim, Settembrini, des personnages plus réels que la vie.
Morante aussi. Ses histoires à elles n'en sont d'ailleurs quasiment pas. C'est seulement le déploiement de ses personnages qui vivent leur vie laissés à eux-mêmes ; Edoardo, Francesco, Anna, Rosaria, n'ont pas besoin d'histoire de roman pour les porter, ils volent tout seul. Pas besoin de citation, d'ailleurs il n'y a rien de particulier à citer, il suffit de dire Edoardo, Anna, Francesco, Rosaria, Cesira, etc.
Morante aussi. Ses histoires à elles n'en sont d'ailleurs quasiment pas. C'est seulement le déploiement de ses personnages qui vivent leur vie laissés à eux-mêmes ; Edoardo, Francesco, Anna, Rosaria, n'ont pas besoin d'histoire de roman pour les porter, ils volent tout seul. Pas besoin de citation, d'ailleurs il n'y a rien de particulier à citer, il suffit de dire Edoardo, Anna, Francesco, Rosaria, Cesira, etc.
lundi 13 février 2006
dimanche 12 février 2006
samedi 11 février 2006
Mihail ben Sama vs Philippe de Hasbourg d'Espagne
"Il ferma les yeux pour ne pas se voir comme l'autre fois, mais pour voir le monde ; et à chaque marche, le monde offrait la tentation de refaire un choix, depuis l'aube des temps mais toujours en un même lieu transfiguré : ce pays-ci, terre vespérale, Hispania, Terra Nostra.
Et à mesure qu'il gravissait les marches, il entendait la double voix de Mihaïl-ben-Sama, une voix qui était deux voix, chacune nette, claire, vague, pressante, deux en une, une en deux.
- Créateur androgyne d'un être inventé à son image et ressemblance
- Père créateur d'un homme incomplet : où est la femme ?
- La première créature se féconde elle-même en se multipliant à l'instar de la terre immaculée
- L'homme viole la femme et tous deux font tort à la nature qui les expulse du jardin malade
- L'harmonie du monde des fils prolonge l'harmonie originelle du monde des parents
- Le frère tue le frère pour posséder la femme subjuguée et la terre inhospitalière
- La diversité des peuples, des langues et des croyances est le résultat d'un métissage qui renforce l'unité du genre humain
- La domination sur la femme et la terre vaincues soulève les peuples les uns contre les autres : l'insuffisance est promue au rang de supériorité, la nécessité au rang de raison
- Toute chose appartient à tous
- Le tien et le mien
Le nôtre
- Je dois mourir : je reviendrai transformé
- Je dois mourir : je ne reviendrai jamais sur la terre
- Je dois vivre : je veux la mort
- Je dois mourir : je veux la gloire
- Je suis un fleuve
- Je suis une ombre
- Tout change
- Rien ne doit changer
- Tout demeure
- Tout doit continuer
- J'aime ce que j'ignore
- Je hais ce que je ne comprends pas
- Je me reconnais dans la différence
- Je détruis la différence
- Que mon sang se mêle à celui de tous
- Que mon sang soit purifié par saignée et cautrisation
- Que mon corps renaisse, enrichi par le mélange des sangs
- Que meure mon corps appauvri par la pureté du sang
- J'aime le travail de mes mains toujours renouvelé : je recrée le paradis
- Indigne de mes mains ascétiques est le travail des esclaves
- Je construis des jardins
- J'élève des panthéons
- Fontaine et giroflée
- Pierre et linceul
- Mon corps fusionne
- Mon corps se sépare
- Amour ou solitude
- Honneur ou déshonneur
- Intelligence de mes sens terrestres
- Ignorance de ce qui me sépare du salut éternel
- Libération de mon corps et de mon esprit ouverts à toute fécondation
- Oppression de mon corps et de mon esprit soumis à la pénitence
- Communauté
- Pouvoir
- Tolérance
- Répression
- Plusieurs
- Un
- Chrétiens, musulmans et juifs
- Hidalgo pur sang
- Espagnols
- Moi, le Roi
- Nouveau Monde
- Vieux Monde
- Alhambra
- Escorial
- Doute
- Foi
- Diversité
- Unité
- Vie
- Mort"
vendredi 10 février 2006
Orion
"C'est mon étoile
Elle a la forme d'une main
C'est ma main montée au ciel
Durant toute la guerre je voyais Orion par un créneau
Quand les zeppelins venaient bombarder Paris ils venaient toujours d'Orion
Aujourd'hui je l'ai au-dessus de ma tête
Le grand mât perce la paume de cette main qui doit souffrir
Comme ma main coupée me fait souffrir percée qu'elle est par un dard continuel"
Thérèse : bientôt la quille !
Je termine donc bientôt la Vie de Thérèse d'Avila par elle-même : ça se tire, ouf ! Quelques jolis passages pourtant, tout de suite gâchés par son misérabilisme récurrent, "je suis indigne" 'comment ai-je osé ?" "moi et mes si grands péchés", etc. Je me demande s'il n'y a pas là une vanité détournée ou inversée à force. A force de lire "moi, des plus misérables", on a envie de lui dire : "mais arrête de te vanter à tout bout de champ, enfin !"
Cela dit, vues intéressantes sur le catholicisme espagnol du 16° siècle. Monde confiné, ranci dans sa dévotion paranoïaque (la peur du scandale, de l'hérésie, du péché, du démon, tout ça cumulé ça fait beaucoup). Quand elle veut fonder son monastère, naturellement elle se heurte à toute la bonne société, les figures sinistres de l'autorité, le Confesseur, le Provincial, le Conseil royal... On lui souffle même la menace de l'Inquisition à un moment ! ce qui la fait rire, tant elle est assurée de sa bonne foi, et donc de passer sans dommage leur examen, peut-être de façon présomptueuse, car qui pouvait être assuré sans aucun doute de trouver grâce aux yeux de ces Messieurs ? Cette Espagne-là, c'est celle qui va chasser ses Morisques et qui a déjà chassé ses juifs (ce qu'elle devait sans doute approuver, en bonne catholique). Les pays "purifiés" sentent la mort, ensuite, ça se vérifie là encore. une fois qu'on ne peut plus décharger ses craintes névrotiques du péché sur l'infidèle, le juif, le sang souillé, il ne reste plus qu'à les retourner sur soi. Finalement, chasse le Juif et l'Infidèle de ta vue, et tu assureras le règne de tes démons intérieurs...
Je repense à Terra Nostra de Fuentès, livre prodigieux, et ce beau tableau si moqueur, que l'on fait danser sous les yeux du roi Philippe, rongé aux vers de son vivant... Il faudra que je le mette ici.
Cela dit, vues intéressantes sur le catholicisme espagnol du 16° siècle. Monde confiné, ranci dans sa dévotion paranoïaque (la peur du scandale, de l'hérésie, du péché, du démon, tout ça cumulé ça fait beaucoup). Quand elle veut fonder son monastère, naturellement elle se heurte à toute la bonne société, les figures sinistres de l'autorité, le Confesseur, le Provincial, le Conseil royal... On lui souffle même la menace de l'Inquisition à un moment ! ce qui la fait rire, tant elle est assurée de sa bonne foi, et donc de passer sans dommage leur examen, peut-être de façon présomptueuse, car qui pouvait être assuré sans aucun doute de trouver grâce aux yeux de ces Messieurs ? Cette Espagne-là, c'est celle qui va chasser ses Morisques et qui a déjà chassé ses juifs (ce qu'elle devait sans doute approuver, en bonne catholique). Les pays "purifiés" sentent la mort, ensuite, ça se vérifie là encore. une fois qu'on ne peut plus décharger ses craintes névrotiques du péché sur l'infidèle, le juif, le sang souillé, il ne reste plus qu'à les retourner sur soi. Finalement, chasse le Juif et l'Infidèle de ta vue, et tu assureras le règne de tes démons intérieurs...
Je repense à Terra Nostra de Fuentès, livre prodigieux, et ce beau tableau si moqueur, que l'on fait danser sous les yeux du roi Philippe, rongé aux vers de son vivant... Il faudra que je le mette ici.
mardi 7 février 2006
Vie de Thérèse d'Avila
Le passage le plus célèbre et le plus savoureux, bien sûr, sur lequel se sont pourléchés des bataillons de psychiatres et de mécréants ricaneurs :
"Je voyais donc l'ange qui tenait à la main un long dard en or, dont l'extrémité en fer portait, je crois, un peu de feu. Il me semblait qu'il le plongeait parfois au travers de mon coeur et l'enfonçait jusqu'aux entrailles. En le retirant, on aurait dit que ce fer les emportait avec lui et me laissait toute entière embrasée d'un immense amour de Dieu. La douleur était si vive qu'elles me faisait pousser ces gémissements dont j'ai parlé. Mais la suavité causée par ce tourment incomparable est si excessive que l'âme ne peut en désirer la fin, ni se contenter de rien en dehors de Dieu. Ce n'est pas une souffrance corporelle ; elle est spirituelle. Le corps cependant ne laisse pas d'y participer quelque peu, et même beaucoup. C'est un échange d'amour si suave entre Dieu et l'âme, que je supplie le Seigneur de daigner dans sa bonté en favoriser ceux qui n'ajouteraient pas foi à ma parole."
Moi, ce que j'aime le plus dans le groupe du Bernin, c'est le sourire de l'ange.
"Je voyais donc l'ange qui tenait à la main un long dard en or, dont l'extrémité en fer portait, je crois, un peu de feu. Il me semblait qu'il le plongeait parfois au travers de mon coeur et l'enfonçait jusqu'aux entrailles. En le retirant, on aurait dit que ce fer les emportait avec lui et me laissait toute entière embrasée d'un immense amour de Dieu. La douleur était si vive qu'elles me faisait pousser ces gémissements dont j'ai parlé. Mais la suavité causée par ce tourment incomparable est si excessive que l'âme ne peut en désirer la fin, ni se contenter de rien en dehors de Dieu. Ce n'est pas une souffrance corporelle ; elle est spirituelle. Le corps cependant ne laisse pas d'y participer quelque peu, et même beaucoup. C'est un échange d'amour si suave entre Dieu et l'âme, que je supplie le Seigneur de daigner dans sa bonté en favoriser ceux qui n'ajouteraient pas foi à ma parole."
Moi, ce que j'aime le plus dans le groupe du Bernin, c'est le sourire de l'ange.
lundi 6 février 2006
al-Kindi
J'aime ce point du Dhkir où les voix de fond se font halètements "Hu-Wa Hu-Wa" évoquant irrésistiblement l'effort sexuel. Les percussions les accompagnant se font, elles, battement de coeur... Et puis la voix du sheikh s'élève, comme un autour spirituel, mais toujours soutenu (et non leur échappant) par ce halètement incandescent, "Hu-Wa, Hu-Wa", plus rude et plus suggestif que les Allahu du mawlid. Un point où l'extase de l'âme adopte le point nadir de la bestialité, comme une hélice ADN tressée, corps et âmes ne peuvent être séparées, sagesse de faire avec, d'en jouer et de s'en ré-jouir.
Vie de Thérèse d'Avila
Sur Pierre d'Alcantara :
"Il me raconta que pendant quarante ans, ce me semble, il n'avait jamais dormi plus d'une heure et demie chaque jour. Sa plus dure pénitence au début avait été de vaincre le sommeil, voilà pourquoi il se tenait toujours ou à genoux ou debout. Le peu de sommeil qu'il s'accordait, il le prenait assis, la tête appuyée contre un morceau de bois fixé à la muraille."
"Il ne portait qu'un habit de grosse bure, sans autre chose sur la chair, encore cet habit était-il aussi étroit que possible, par-dessus un petit manteau d'étoffe. Il m'a dit que dans les grands froids, il le quittait et ouvrait la porte et la petite fenêtre de sa cellule, puis reprenait son manteau et fermait la porte, c'est ainsi qu'il reposait son corps et le mettait un peu plus à l'abri."
Le moins qu'on puisse dire, c'est que tout ça manque un peu de lâcher-prise.... Parce que ne pas dormir par excès de joie, ou parce qu'on trouve avoir mieux à faire, je veux bien. Mais uniquement pour se contrarier... Finalement ces "saints" sont toujours très occupés d'eux-mêmes. C'est à se demander si entre deux tourments qu'ils s'infligent ils trouvent le temps de penser à Celui qu'ils disent aimer.
L'indifférence aux intempéries, la victoire sur la douleur, la mortification dans le but d'obtenir une plus grande puissance, ou un avantage quelconque (vie éternelle, épiphanie, etc) on trouve ça à peu près chez tous les ascètes. C'est aussi le cas de l'épicurien, sauf que pour lui le but est de ne souffrir ni du manque, ni du plaisir lorsqu'il survient, et non de refuser les dons du bonheur, un peu comme un errant cracherait sur le pain des anges. Car en fait, refuser tout plaisir pour se rapprocher de l'Aimé, soit, mais n'est-ce pas faire fi aussi de ses dons à lui ?
"il m'a raconté avoir passé trois ans dans une maison de son ordre sans connaître un seul des religieux, si ce n'est au son de sa voix, car il ne levait jamais les yeux ;"
"Pendant de longues années il n'a jamais regardé une femme."
Celle-là aussi est gratinée quand on pense que le christianisme c'est avant tout l'amour du prochain.
samedi 4 février 2006
Ouragan sur la Louisiane, les islamistes y voient le châtiment de Dieu contre les Croisés en stetson, ce que récusent bien sûr, indignés, les dévots américains qui y voient eux un châtiment de Dieu contre la société pécheresse. Une bousculade bien meurtrière à La Mecque puis un ferry qui sombre de retour du hajj, les salafistes y verront-ils encore la colère de Dieu contre eux ? Pas sûr, Dieu c'est bien connu, ne peut taper que l'ennemi, la brebis douteuse ou galeuse... Ce sera sans doute un châtiment contre les mauvais musulmans, les tièdes, les non-Salafistes. Bien sûr, il aurait pu couler un ferry danois pour bien faire, mais Alla ul-Haqq !
Les athées diront que c'est la preuve qu'il n'y a pas de Dieu, comme si Dieu ne pouvait être que bon ! ça me rappelle ce passage du Journal de Nabe, écrit avec l'accident de RER de la gare de Lyon, qui avait été une jolie boucherie :
""Il n'y a pas de Bon Dieu", disent les naïfs. Si justement, il y en a un ! C'est justement dans ces circonstances qu'il est plus présent que jamais. C'est Bloy qui m'a fait comprendre ça. J'en suis maintenant persuadé. Je dirais même que Dieu est toujours absent quand tout va bien. Le drame, l'horreur, les accidents surtout qui déchirent si fort la vie sont des manifestations de Dieu : il bouge le petit doigt. On sent sa présence. Il s'exprime, par la sanction ! Dieu est en colère contre l'impiété de l'homme et donc le punit en tapant là où ça fait mal, dans le tas d'innocents à coups de hasard... C'est dans ces moments-là qu'on est sûr que Dieu existe...
Pourquoi ces accidents horribles ? Parce que l'homme n'est pas gentil avec Dieu."
M.E. Nabe, Kamikaze, p. 2734.
En parlant de Bloy, lui vit dans l'éruption de la montagne Pelée du 8 mai 1902 un lien direct, un clin d'oeil divin ? avec la première communion de sa fille Véronique :
"10 mai 1902. Premières nouvelles de l'immense catastrophe de la Martinique. Trente mille morts en quelques secondes, à l'heure précise de la première communion de Véronique ! Le hasard n'existant pas, cette extermination était indispensable pour que fût contrebalancée, dans l'infaillible Main, l'acte prodigieux de notre enfant. Il ne fallait pas une victime de moins à cette innocente et le volcan, depuis des siècles, attendait son signe."
Vie de Thérèse d'Avila
Les chapitres où elle détaille les étapes spirituelles de l'oraison jusqu'au ravissement de l'âme sont plus intéressantes. En gros cela correspond aux maqams soufis et au hal. sauf que ce qu'elle appelle ravissement est en fait lévitation. C'est assez courant chez les moines de partout, mais loin d'être impressionnant je ne peux pas m'empêcher de trouver ça comique au fond. Je crois que voir quelqu'un s'élever en l'air comme ça me ferait éclater de rire, tout simplement. Parce que c'est avant tout, très drôle. Sinon mis à part Foudre bénie qui a des visions et cet autre lama, vu par Alexandra David-Neel, qui faisait ainsi des kilomètres comme ça sans toucher le sol, on ne peut pas dire que ce soit d'une grande utilité quand on se claquemure dans un couvent.
Impression qu'il y a deux sortes de mystiques, et ce chez les soufis comme chez les chrétiens et peut-être tous les autres : ceux qui pour s'unir à Dieu s'astreignent à se retrancher du monde, ou retrancher le monde d'eux, et du coup c'est un perpétuel assaut entre l'existence terreste qui les sépare de l'Union d'où culpabilité, névrose, et quelque chose d'à la fois épuisant et pathétique... et ceux qui, comme Qays devenu fou (Majnoun) voyait Layla partout, et si on lui montrait un caillou disait "Layla", et un nuage disait "Layla" et n'importe quel passant était "Layla", il y a ces mystiques qui voient Dieu partout, en tout dans le monde. Psychose contre névrose ? C'est sans doute alors plus réussi, et plus serein. Dieu est partout pour eux et il n'y a pas besoin de se tourmenter/mortifier autant pour savoir si on a commis un adultère envers Dieu parce qu'on a posé le pied droit avant le pied gauche au lever, qu'on a repris trois fois de la compote au réfectoire ou qu'on a remarqué que le confesseur avait de jolies mains.
Impression qu'il y a deux sortes de mystiques, et ce chez les soufis comme chez les chrétiens et peut-être tous les autres : ceux qui pour s'unir à Dieu s'astreignent à se retrancher du monde, ou retrancher le monde d'eux, et du coup c'est un perpétuel assaut entre l'existence terreste qui les sépare de l'Union d'où culpabilité, névrose, et quelque chose d'à la fois épuisant et pathétique... et ceux qui, comme Qays devenu fou (Majnoun) voyait Layla partout, et si on lui montrait un caillou disait "Layla", et un nuage disait "Layla" et n'importe quel passant était "Layla", il y a ces mystiques qui voient Dieu partout, en tout dans le monde. Psychose contre névrose ? C'est sans doute alors plus réussi, et plus serein. Dieu est partout pour eux et il n'y a pas besoin de se tourmenter/mortifier autant pour savoir si on a commis un adultère envers Dieu parce qu'on a posé le pied droit avant le pied gauche au lever, qu'on a repris trois fois de la compote au réfectoire ou qu'on a remarqué que le confesseur avait de jolies mains.
mercredi 1 février 2006
Thérèse d'Avila : Vie écrite par elle-même
Pour le moment, je viens de commencer, je suis assez consternée. Mortification, masochisme poisseux, névrose d'angoisse, si c'est ça la béatitude, vive l'enfer... Enfin cette haine du corps, du plaisir, de la beauté, me sera toujours étrangère. Que vaut une religion qui ne rend pas heureux ? Culpabilité, flagellation, ramper, se morfondre, hum, même en étant éprise de Dieu, est-ce se rendre aimable, cela ?
"Une religieuse souffrait alors d'un mal très grave et très pénible. C'étaient des ouvertures que des obstructions lui avaient occasionnées au ventre, et par où elle rejetait les aliments. Elle ne tarda pas d'ailleurs à succomber. Je voyais que toutes les religieuses redoutaient son mal. Pour moi, j'avais grande envie d'une patience pareille à la sienne ; et, s'il plaisait à Dieu de m'en donner une semblable, je le suppliais de m'envoyer toutes les maladies qu'il voudrait. Je n'en redoutais aucune, ce semble, tant j'étais résolue de gagner à tout prix les biens éternels."
"Un repentir très profond s'emparait de moi, dès que j'avais offensé Dieu ; et souvent, je m'en souviens, je n'osais plus faire oraison, car je redoutais comme un grand châtiment la douleur cruelle que je devais y ressentir de l'avoir offensé. Cette disposition prit ensuite de telle proportions que je ne sais à quoi comparer un pareil tourment."
"Je n'aime ni le monde, ni rien de ce qui le concerne."
"Ainsi, durant vingt ans, j'étais prise de vomissements tous les matins ; il m'était impossible de prendre aucune nourriture jusqu'au milieu du jour, quelquefois même plus tard. Depuis que je fais la communion plus souvent, les vomissements me viennent le soir, avant d'aller prendre mon sommeil, et avec une peine plus grande. Je dois moi-même les provoquer à l'aide d'une plume ou d'autre chose ; car si j'omets de le faire, la souffrance est très vive."
En tournant les pages, comme Nieztsche soulevé de dégoût dans L'Antéchrist, on a envie de dire : "de l'air ! de l'air !"
Je n'aime décidément pas les dévots. Et comme l'athéisme devant ça, doit être une saine goulée d'air frais, de plaisir, d'altitude !
Vie écrite par elle-même
"Une religieuse souffrait alors d'un mal très grave et très pénible. C'étaient des ouvertures que des obstructions lui avaient occasionnées au ventre, et par où elle rejetait les aliments. Elle ne tarda pas d'ailleurs à succomber. Je voyais que toutes les religieuses redoutaient son mal. Pour moi, j'avais grande envie d'une patience pareille à la sienne ; et, s'il plaisait à Dieu de m'en donner une semblable, je le suppliais de m'envoyer toutes les maladies qu'il voudrait. Je n'en redoutais aucune, ce semble, tant j'étais résolue de gagner à tout prix les biens éternels."
"Un repentir très profond s'emparait de moi, dès que j'avais offensé Dieu ; et souvent, je m'en souviens, je n'osais plus faire oraison, car je redoutais comme un grand châtiment la douleur cruelle que je devais y ressentir de l'avoir offensé. Cette disposition prit ensuite de telle proportions que je ne sais à quoi comparer un pareil tourment."
"Je n'aime ni le monde, ni rien de ce qui le concerne."
"Ainsi, durant vingt ans, j'étais prise de vomissements tous les matins ; il m'était impossible de prendre aucune nourriture jusqu'au milieu du jour, quelquefois même plus tard. Depuis que je fais la communion plus souvent, les vomissements me viennent le soir, avant d'aller prendre mon sommeil, et avec une peine plus grande. Je dois moi-même les provoquer à l'aide d'une plume ou d'autre chose ; car si j'omets de le faire, la souffrance est très vive."
En tournant les pages, comme Nieztsche soulevé de dégoût dans L'Antéchrist, on a envie de dire : "de l'air ! de l'air !"
Je n'aime décidément pas les dévots. Et comme l'athéisme devant ça, doit être une saine goulée d'air frais, de plaisir, d'altitude !
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Dans la vie on prend toujours le mauvais chemin au bon moment. Dany Laferrière.
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