samedi 21 février 2004

De nos jours, à chaque fois que l'on parle de mode de pensée culpabilisante, austère, pudibonde, moralisatrice en somme, on applique en réflexe (c'est-à-dire sans réflexion) le qualificatif : "judéo-chrétien".

Alors que très peu de nos contemporains sont véritablement instruits en théologie chrétienne et encore moins en pensée judaïque. Mais c'est sans appel, tous les maux qu'ont causé l'homme occidental au monde, sont issus de la "pensée judéo-chrétienne".

Et pour le tiers-monde, c'est naturellement l'islam qui fait figure d'épouvantail alors que le bouddhisme est si "sympathique".

mercredi 4 février 2004


"Car ce drame mythique rappelait à l'homme que la souffrance n'est jamais définitive, que la mort est toujours suivie de la résurrection, que toute défaite est annulée et dépassée par la victoire finale. L'analogie entre ces mythes et le drame lunaire, esquissée au chapitre précédent, est évidente. Ce que nous voulons souligner dès maintenant est que Tammuz - ou toute autre variante du même archétype - justifie, en d'autres termes rend supportables, les souffrances du "juste". Le Dieu - comme tant de fois le "juste", l'"innocent" - souffrait sans être coupable. Il était humilié, battu jusqu'au sang, enfermé dans un "puits", c'est-à-dire en Enfer. C'est là que la Grande Déesse (ou, dans les versions tardives et gnostiques, un "messager") lui rendait visite, lui donnait du courage et le ressuscitait. Ce mythe si consolant de la souffrance du dieu a mis du temps à disparaître de la conscience des peuples orientaux."


lundi 2 février 2004

Nous sommes tous égaux.

Nous sommes tous égaux, ça ne veut rien dire. Nous sommes tous égaux, point final, ça ne veut rien dire. Egaux en quoi ? "Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits" par exemple, en droit, là c'est clair, une égalité juridique, civique, politique. Ou alors on pourrait dire "Les hommes doivent être tous égaux en revenus", ou en gènes (on peut imaginer le délire d'un isogénisme aussi utopique que l'eugénisme). Mais égaux tout seul ? ça ne veut pas dire plus que l'assertion contraire, "Les hommes sont tous inégaux". Mais voilà, la première affirmation, même si elle ne veut rien dire, déclenche automatiquement la sympathie générale, le aaah de satisfaction soulagée, la pensée émotionnelle se dirigeant d'emblée sur la connotation positive : égal. Je suis égal à tous, sous-entendu : personne ne peut prétendre valoir plus que moi, et puis tout le monde fondamentalement vaut la même chose, c'est-à-dire que personne ne vaut mieux que moi, même si je ne m'aime pas, je peux dire que pour les autres c'est pareil, donc je ne serai pas rejeté de la bande, voilà.

C'est un très gentil point de vue, mais c'est un point de vue de caves. C'est-à-dire que tant que l'on reste dans une bulle confortable et généreuse, on peut toujours y croire. Toutes les personnes ayant fait l'expérience de l'univers concentrationnaire, ou de la dictature ou de toute autre situation où les hommes gentils-et-égaux étaient laissés à eux-mêmes savent qu'on fait très vite la différence entre les franchement pourris, les moyennement lâches et courageux alternativement, les quelques élites morales (eh oui élites) qui résisteront aux pires pressions. C'est comme ça, nous sommes égaux en droits, mais pas en droiture, ni en courage, ni en intelligence, ni en bonté, ni en désintéressement, etc.. Non Einstein n'est pas légal en valeur humaine de Hitler, Essenine et Maïakovsky valent plus que Beria ou Staline, et c'est pas la peine de chercher systématiquement une enfance difficile derrière tout ça.

Mais voilà dire "nous sommes tous égaux", c'est se dispenser d'avancer, de se grandir. Alors que le point de départ de toute vie humaine est bien de se dire: "je vaux plus que d'autres, et d'autres valent mieux que moi."

Il y a quelque chose de la bêtise new age dans cette vision statique, presque une régression, le monde vu comme un grand jardin d'enfant où on devrait tous se tenir par la main et ne jamais quitter la ronde pour aller voir plus loin. Et puis ce genre de pensée niaise conduit à nier que chacun, à un moment ou un autre, puisse assumer librement un choix moral, en toute responsabilitié, sans excuses ni circonstances atténuantes, c'est refuser le libre-arbitre, ce qui après tout est un système philosophique en soi.

Dans la vie on prend toujours le mauvais chemin au bon moment. Dany Laferrière.