lundi 20 septembre 2010

L'écrivain : "on s'est déjà rencontré dans les livres ?"


L'écrivain, putching-ball éternel des lecteurs sourcilleux et des journalistes maussades, comme c'est vrai !  Peut-être parce qu'il est difficile de comprendre que dans l'écriture il n'y a rien à comprendre, justement. Juste lire. Rien à dire sur l'acte d'écrire, un acte inconséquent. Du coup, l'écrivain passe pour un dissimulé, un faux-jeton.

"Un homme m'aborde dans la rue.
Vous écrivez toujours ? Parfois.
Vous avez dit que vous n'écrirez plus. C'est vrai.
Alors pourquoi écrivez-vous maintenant ?
Je ne sais pas.
Il est parti, l'air offensé.

La plupart des lecteurs 
se prennent pour des personnages de roman.
Ils considèrent leur vie comme une histoire
pleine de bruits et de fureurs
dont l'écrivain ne peut être  
que l'humble scribe."

J'ai connu – plus d'une fois, je crois – ce lecteur qui, lors d'une signature, vient me dire : "Ah, ma vie, c'est un roman, vous savez ! Il y a de quoi écrire des cahiers. Évidemment, il faudrait un écrivain pour ça…", en me regardant, avec espoir. 

Les meilleurs de mes personnages sont ceux qui se sont installés dans une histoire par effraction, ceux qui ne devaient faire que passer, et restent et se déploient et s'imposent, sans que j'ai prise sur ça. Ceux que j'ai de toutes pièces inventés.

"La machine enregistre. En fin de compte, vous n'écrivez que sur l'identité ? Je n'écris que sur moi-même. Vous l'avez déjà dit, ça. Ça n'a pas l'air d'avoir été entendu. Vous avez l'impression qu'on ne vous écoute pas ? Les gens lisent pour se chercher et non pour découvrir un autre. Paranoïaque ? On ne l'est jamais assez. Pensez-vous que vous serez un jour lu pour vous-même ? C'était ma dernière illusion avant de vous croiser. Vous me paraissez différent dans la réalité. On s'est déjà rencontrés dans un livre ? Elle ramasse son matériel avec cet air ennuyé capable de vous pourrir une journée ensoleillée."

Si on me demande pourquoi j'écris, je peux dire que je ne me sens jamais autant seule – et donc libre – que devant une feuille vierge, stylo en main. C'est donc la raison pour laquelle j'écris ? Non, bien sûr que non.

Notes prises en lisant  :L'énigme du retour 



Dans la vie on prend toujours le mauvais chemin au bon moment. Dany Laferrière.