Kitāb Salāmān va Absāl (Le Livre de Salāmān et d'Absāl), Jāmī (d. 1492/898). Iran, 16ème ou 17ème siècle, MS P16, National Library of Medecine)
Comme beaucoup de soufis, Tirmidhî considérait la nature féminine comme plus encline à la walayat ("sainteté" si l'on veut) et il défend cela en quatre points (avec des arguments amusants tant cela va à l'encontre de l'image d'aujourd'hui du musuman exciseur, pédophile, lapidateur et j'en passe, enfin tout ce dont Charlie Hebdo (et cie) fait son miel en se pourléchant devant chaque fait divers, comme les lecteurs de Détective salivent devant la description de la énième femme tronc retrouvée dans une valise car découpée par son amant) : "S'appuyant sur une sélection rigoureuse des traditions prophétiques les plus favorables aux femmes, l'auteur présente, d'entrée de jeu, la condition féminine comme un avantage important en vue de la sainteté. On peut, sans exagérer, dire qu'il voit en toute femme, a priori, une sainte. Le comportement qui s'impose,dans ce cas, à leur égard, doit être irréprochable et empreint de pureté, de douceur d'amabilité désintéressée, de bonté et de prévenance."
Ce qui en fait est l'attitude typique de la futuwwat ou djavanmardî, recommandée aussi entre soufis ou plus étroitement, les awliya (Amis de Dieu). Indulgence toute aussi amusante (même si un peu partisane et guère réaliste) qui va à l'encontre de la "nature intrinsèquement perverse" de la féminité via la figure d'Eve dans le christianisme :
"Le second point est le corollaire immédiat du premier, à savoir le respect que les hommes doivent manifester à l'égard des femmes. Il ressort de tous les examens donnés que lorsqu'une faute est commise, la responsabilité en revient très rarement à la femme, mais bien plutôt à l'homme, qui, sous couvert de bons procédés, ne pense qu'à lui dérober un plaisir illicite, ne serait-ce que par le regard. Tirmidhî se montre ici extrêmement critique vis à vis des hommes dont il n'excuse aucun comportement ambigu, fort de sa connaissance psychologique de leur grande vulnérabilité à l'égard de tout ce qui touche au sexe. mais il n'en fait nullement un prétexte pour blâmer, contraindre ou enfermer les gens. Au contraire, il souligne le fait qu'il incombe à l'homme de maîtriser ses instincts et de se surveiller constamment afin d ene pas basculer vers le "vol du plaisir" en observant tout simplement son propre sexe, indicateur visible et infaillible de ses motivations lorsqu'il entreprend un quelconque commerce avec une femme. S'il y a fornication dans une relation, toute la faute en revient donc à l'homme, qui dispose d'un moyen de contrôle imémdiat de son état."
"Le second point est le corollaire immédiat du premier, à savoir le respect que les hommes doivent manifester à l'égard des femmes. Il ressort de tous les examens donnés que lorsqu'une faute est commise, la responsabilité en revient très rarement à la femme, mais bien plutôt à l'homme, qui, sous couvert de bons procédés, ne pense qu'à lui dérober un plaisir illicite, ne serait-ce que par le regard. Tirmidhî se montre ici extrêmement critique vis à vis des hommes dont il n'excuse aucun comportement ambigu, fort de sa connaissance psychologique de leur grande vulnérabilité à l'égard de tout ce qui touche au sexe. mais il n'en fait nullement un prétexte pour blâmer, contraindre ou enfermer les gens. Au contraire, il souligne le fait qu'il incombe à l'homme de maîtriser ses instincts et de se surveiller constamment afin d ene pas basculer vers le "vol du plaisir" en observant tout simplement son propre sexe, indicateur visible et infaillible de ses motivations lorsqu'il entreprend un quelconque commerce avec une femme. S'il y a fornication dans une relation, toute la faute en revient donc à l'homme, qui dispose d'un moyen de contrôle imémdiat de son état."
Sur le voile, ce brave sheikh est si pudique, et si sourcilleux d'équité dans la nécessaire pudeur, qu'au fond, il se laisserait bien aller à le recommander aux hommes aussi :
"Dans l'optique de ce qui vient d'être dit, le voile est intimement lié à la pudeur et se trouve, de ce fait, susceptible de concerner aussi bien les hommes que les femmes. En effet, la personne qui se voile, homme ou femme, ne le fait pas uniquement dans le but de se cacher, de se protéger du regard de l'autre, mais aussi et surtout, de manifester sa décision de ne pas chercher à percer l'intimité de l'autre. C'est ce que Tirmidhî rappelle par une tradition prophétique mettant en scène un aveugle : les femmes du prophète sont invitées par lui à se voiler devant cet homme. Elles font remarquer qu'il ne peut pas les voir. Le prophète leur répond : Et vous, êtes-vous aveugles ? Cette tradition est reprise et commentée dans un passage de Nawâdir al-usûl qui apporte un éclairage complémentaire à la question : "La raison profonde du voile est apparue avec évidence : Je veux dire par là purifier les coeurs des deux groupes ensemble : les coeurs des hommes par rapport aux femmes et les coeurs des femmes par rapport aux hommes." Il approfondit ainsi la signification du port du voile en montrant que sa signification réelle est, non pas la soumission à une coutume en tant que telle, ni à aucune loi précise destinée à imposer de l'extérieur telle ou telle pièce de vêtement, mais une manifestation tangible du pur respect de la pudeur que chaque individu met en acte à sa manière. Ce point est d'ailleurs confirmé par un passage expliquant que la pudeur, dont les femmes ont d'ailleurs été le mieux dotées, réside dans l'oeil, c'est-à-dire dans le regard que chacun porte sur l'autre, et non pas dans la tenue qu'il revêt.
Plus important encore, Tirmidhî précise de la manière la plus explicite qui soit que la prescription religieuse du voile a été adressée aux femmes du prophète et ce, pour des raisons bien précises : "Le hijâb a été imposé aux femmes du prophète comme un bienfait de Dieu à l'égard de l'Envoyé. Dieu a fait de ses épouses les mères des croyants afin de les interdire à quiconque après lui.""
Le quatrième pose un problème au fond, à ce sheikh qui fut monogamme, (maints soufis ou gnostiques choisirent carrément le célibat, pourtant mal vu, ce qui peut expliquer la popularité de la figure de Jésus dans ces courants mystiques et ascétique, dont le mode de vie libre et ascétique était à tous points de vue plus conforme au leur) :
"En effet, Tirmidhî, dans sa fidélité aux règles de la loi islamique, reconnaît que la polygamie est permise aux hommes, bien que tous les récits concernant sa vie semble confirmer que, pour sa part, il ne l'a pas pratiquée. Son raisonnement devient beaucoup plus original lorsqu'il se met en tête de justification à cette règle."
En clair : "Dieu a permis aux hommes de bien d'épouser quatre femmes et aux prophètes autant qu'ils veulent, alors qu'il n'a autorisé les femmes qu'à avoir un seul homme dans cette vie comme dans l'au-delà, parce que la femme trouve tout ce qu'elle désire avec un seul homme, alors que ce n'est pas le cas de l'homme."
On voit que ce bon Hakim ne devait pas recueillir souvent les confidences des gynécées. Il étaie son raisonnement sur la croyance musulmane, commune avec les Grecs, que le plaisir féminin est plus puissant : ""Dieu a privilégié les femmes par quatre-vingt-dix-neuf parts de la passion et l'homme par une seule part." Cette passion se traduit par la puissance du plaisir éprouvé : "Nous trouvons dans le livre révélé de Dieu : La différence de valeur entre le plaisir de la femme et celui de l'homme en faveur de celle-ci est comparable à la trace laissée dans l'argile par un fuseau et celle laissée par un karzan"" (une grand hache).
Quant à la permission donnée aux prophètes d'avoir autant d'épouses qu'il leur plaît c'est en fait un geste de Dieu pour pallier l'inconvénient de leur haut degré spirituel, qui en fait des surhommes : "Plus un homme se rapproche de Dieu, et plus il s'élève dans l'amour divin, plus il se trouve rempli de miséricorde divine. Or, la miséricorde est, chez Tirmidhî, représentée concrètement par l'eau puisqu'elle est elle-même une eau spirituelle. De ce fait, l'homme qui atteint ces degrés élevés voit augmenter et s'agiter en lui l'eau de ses lombes. Il lui faut alors s'épancher en une femme de ce qui lui cause une gêne."
Mais Tirmidhî était un des Quarante, et donc un saint. Il bénéficiait logiquement de cette grâce surabondante qui a l'inconvénient de descendre dans les couilles des prophètes et de les gonfler exagérément. Pourtant il n'a pas eu l'air d'en être incommodé. C'est que les hommes qui ont atteint l'état de walayat, sont plus dotés de pudeur que les autres, sont en fait presque aussi pudiques que des femmes : "En effet, connaissant la manière de raisonner de Tirmidhî, on est frappé par le fait qu'il cite, comme ayant droit à la polygamie, seulement les "hommes" (rijâl) et les prophètes, alors qu'invariablement il associe les saints aux prophètes, dans chaque exemple qu'il donne. On peut se demander s'il n'y a pas à cela une raison qui pourrait avoir trait à une disposition particulière de ces saints, modèles par excellence après la période de la Révélation, et dont lui-même admet, quoique très discrètement, faire partie, pour la monogamie. En effet, selon son système, seuls certains saints, à l'exclusion de tous les autres hommes, y compris les prophètes, peuvent recevoir la confirmation de la maîtrise totale de leur "moi"."
Geneviève Gobillot : Introduction au Livre des nuances ou de l'impossibilité de la synonymie (Kitâb al-furûq wa man' al-taradûf), Al-Hakîm al-Tirmidhî.
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