Ou comment le "politiquement moral" a précédé le "politiquement correct" pour contrarier l'étude de l'histoire :
"... le siècle est trop collet monté ; il faut se rappeler ce grand mot que j'ai ouï répéter bien des fois à lord Byron :This age of cant. Cette hypocrisie si ennuyeuse et qui ne trompe personne a l'immence avantage de donner quelque chose à dire aux sots : ils se scandalisent de ce qu'on a osé dire telle chose ; de ce qu'on a osé rire de telle autre, etc. Son désavantage est de raccourcir infiniment le domaine de l'histoire."
Sur le don Juan, héros chrétien :
"Pour que le don Juan soit possible, il faut qu'il y ait de l'hypocrisie dans le monde. Le don Juan eût été un effet sans cause dans l'antiquité ; la religion était une fête, elle exhortait les hommes au plaisir, comment aurait-elle flétri des êtres qui faisait d'un certain plaisir leur unique affaire ? Le gouvernement seul parlait de s'abstenir ; il défendait les choses qui, pouvaient nuire à la patrie, c'est-à-dire à l'intérêt bien entendu de tous, et non ce qui peut nuire à l'individu qui agit."
Tout homme qui avait du goût pour les femmes et beaucoup d'argent pouvait être un don Juan dans Athènes, personne n'y trouvait à redire ; personne ne professait que cette vie est une vallée de larmes et qu'il y a du mérite à souffrir
Je ne pense pas que le don Juan athénien pût arriver au crime aussi rapidement que le don Juan des monarchies modernes ; une grande partie du plaisir de celui-ci consiste à braver l'opinion, et il a débuté, dans sa jeunesse, par s'imaginer qu'il bravait seulement l'hypocrisie."
Sur le don Juan de Molina : "C'est probablement la comédie du monde qui a été représentée le plus souvent. C'est qu'il y a le diable et l'amour, la peur de l'enfer et une passion exaltée pour une femme, c'est-à-dire, ce qu'il y a de plus terrible et de plus doux aux yeux de tous les hommes, pour peu qu'ils soient au-dessus de l'état sauvage."
"C'est donc en Italie et au XVI° siècle seulement qu'a dû paraître, pour la première fois, ce caractère singulier. C'est en Italie et au XVII° siècle qu'une princesse disait, en prenant une glace avec délices le soir d'une journée fort chaude : "Quel dommage que ce ne soit pas un péché !"
Stendhal, Chroniques italiennes, Les Cenci.
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