Mais la musique de Takemitsu est buccolique. Il y a un génie japonais qui met autant d'importance à poser le pépiement d'un oiseau sur la trame d'une histoire que la tragédie d'un homme. Je ne sais si c'est à cause du shintoisme. Un monde fait d'une foule de petits génies, parfois entre eux discordant, doit ressembler à ça, cette musique de sons concrets. La flûte s'élève, vacille, retombe, avec autant d'apparent hasard que la course d'une feuille morte dans le vent. Une corde basse gronde, gronde, la voix d'un crapaud et puis se tait, sans motif invoué ni pour son surgissement ni pour son effacement.
Dans la musique modale, il y a comme une recherche enfiévrée de sens. Elle fait éclater les peines humaines, joie, tristesse, victoire, pleurs, deuil, tendresse brûlante, tout cela est ligible, intelligible, ressenti d'emblée, tout cela se porte à notre hauteur. La musique amodale nous laisse suggérer que peut-être il n'y a pas de sens. La flûte de Takemitsu nous ramène à la vacuité apparente qui doit réveiller. On apprend plus à s'écouter on écoute le monde. Se fier à la voix du crapaud.
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