mercredi 20 août 2008

Soleil trompeur


Un film fabuleux de bout en bout, dont le début et la fin sont les même deux points sombres, lugubres, d'un appartement moscovite, où Mitia joue sur la mort. Entre ça, tout le monde, journée radieuse, un monde agréable, fantaisiste et léger, cette merveilleuse folie des artistes russes, derniers aristocrates de ce monde, une journée de blé, d'eau miroitante, de fanions rouges, où les komsomols côtoient les dernières vieilles dames de la "Belle époque".

Aux premières images, la victime désignée, le colonel, apparaît comme un brave gars, loyal et droit dans ses bottes, paternaliste et affectueux envers ses hommes, le nouveau barin des paysans venus l'appeler au secours. Tout cela jusqu'à ce que Dimitri fasse son entrée dans la villa. Car alors qu'il vient comme l'émissaire de la mort, tout de suite, en quelques notes de piano, comme le reste de la famille, on lui fait fête, séduisant et bouffon jusqu'au bout, frêle devant les épaules musclées de sa victime, encaissant ses coups de poing avec le sourire, sans veulerie, sûr du rôle qu'il joue, celui du "paie-tes-dettes".

A côté Maroussia fait elle, véritablement veule, d'abord indignée et puis facilement apaisée par les biceps et les coups de rein musclés : en gros, pour adoucir bonbonne, tu la tringles... C'est peut-être cela que Mitia ne pardonne pas à Kotov, ou à la Révolution, d'avoir transformé la fillette des années heureuses, en femme à soldat, pire, à officier qui bombe le torse et le ventre : "Il y a, vois-tu, Chérie, le Devoir et la Peur, moi, c'est le Devoir..."

Ce qui fait qu'à la fin, quand, dans l'automobile de la NKVD, tout bascule, c'est plus le dégoût qui l'emporte que la pitié.

Quant à Nadia, trompée tout le long du film et aimant jusqu'au bout, c'est la Russie toute neuve, celle des enfants ingénus nés sous Staline et le Soleil trompeur de la patrie, qui finira au Kazakhstan, en compagnie des relégués du Pavillon des Cancéreux.

Après la chute de la dernière séquence, si déterminée à être désespérée, repentir après 15 ans, puisqu'une suite est en cours. Pour le coup, c'est casse-gueule.

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Dans la vie on prend toujours le mauvais chemin au bon moment. Dany Laferrière.