"J'avais été, avant la séance, voir les peintures de Courbet. J'ai été étonnée de la vigueur et de la saillie de son principal tableau; mais quel tableau ! quel sujet ! La vulgarité des formes ne ferait rien; c'est la vulgarité et l'inutilité de la pensée qui sont abominables; et même, au milieu de tout cela, si cette idée, telle quelle, était claire ! Que veulent ces deux figures ? Une grosse bourgeoise, vue par le dos et toute nue sauf un lambeau de torchon négligeamment peint qui couvre le bas des fesses, sort d'une petite nappe d'eau qui ne semble pas assez profonde seulement pour un bain de pied. Elle fait un geste qui n'exprime rien, et une autre femme, que l'on suppose sa servante, est assise par terre occupée à se déchausser. On voit là des bas que l'on vient de tirer : l'un d'eux, je crois, ne l'est qu'à moitié. Il y a entre ces figures un échange de pensées qu'on ne peut comprendre. Le paysage est d'une vigueur extraordinaire, mais Courbet n'a fait autre chose que mettre en grand une étude que l'on voit là près de sa toile; il en résulte que les figures y ont été mises ensuite et sans lien avec ce qui les entoure (...)
O Rossini ! O Mozart ! O les génies inspirés dans tous les arts, qui tirent des choses seulement ce qu'il faut en montrer à l'esprit ! Que diriez-vous devant ces tableaux ? Oh ! Sémiramis ! Oh ! entrée des prêtres, pour couronner Ninias !"
Vendredi 15 avril 1853. Journal de Delacroix.
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