Sur la sacro-sainte tolérance, valeur suprême de notre début de siècle avec le pacifisme et (bientôt rejoints par le végétalisme et les campagnes anti-foie gras) réflexions moqueuses et fines de Jankélévitch : est-ce que les tolérants au fond ne sont-ils pas foncièrement, au choix ou séparément : hypocrites, méprisants, élitistes ? La tolérance, une vertu ? mon oeil ! semble-t-il dire ? Regardez-vous un peu dans le miroir... Pourquoi, au fond, êtes-vous tolérants ? Et l'êtes-vous tant que ça quand vous l'affichez ? Et finalement, êtes-vous des gens bien parce que tolérants ? ou le contraire, d'affreux brahmanes méprisants ou calculateurs ?
Ceci naturellement, peut s'appliquer aussi bien pour un croyant supportant avec un sourire bénin les athées ou mécréants, qu'un athée tolérant avec "indulgence" ces doux dingues de croyants, sans pour autant admettre qu'ils se rendent coupables de prosélytisme. Dans les deux sens, le prosélytisme, mal absolu ? Pourtant...
"Ne pas toucher : ceci est commun aux conduites de tolérance et aux conduites de pureté ; le pur craint que l'intouchable ne lui donne ses pous ; le tolérant, plutôt que de violenter ou d'endoctriner son prochain, préfère ne pas le toucher. - Autrui, pour le tolérant, est un être opaque et impénétrable qu'on ne peut ni aimer ni comprendre, et qu'on a même renoncé à sauver. Nous nous désintéressons du salut de son âme. Désespérant de convertir celui qui est dans l'erreur, le tolérant abandonne le toléré à son sort ! Il le tolère tel qu'il est. Si nous tolérons l'adversaire, cela veut dire du même coup que nous ne chercherons pas à l'améliorer, que nous renonçons à l'amender, que nous le laisserons croupir dans sa crasse et ses erreurs. Entre la tolérance et le mépris, il y a des transitions insensibles, et l'on peut glisser de l'un à l'autre facilement facilement. Par la tolérance, l'homme paraît s'installer définitivement dans son statut de déchirure."
Ceci naturellement, peut s'appliquer aussi bien pour un croyant supportant avec un sourire bénin les athées ou mécréants, qu'un athée tolérant avec "indulgence" ces doux dingues de croyants, sans pour autant admettre qu'ils se rendent coupables de prosélytisme. Dans les deux sens, le prosélytisme, mal absolu ? Pourtant...
"Je supporte mon prochain, mais cela ne nous dit pas dans quel esprit je le supporte, ni pour quelle raison. Et si c'était par dédain ? Je dédaigne d'entrer en discussion avec lui et de lui faire la guerre. La motivation des conduites de tolérance est aussi variable que celle des conduites de patience. Son motif peut n'avoir rien de spécialement moral, comme le prouve le monde d'aujourd'hui, où l'on est souvent tolérant dans l'espoir que le fruit mûrira tout seul ; peut-être n'aurons-nous pas besoin d'assassiner, ni de convertir notre prochain, peut-être se convertira-t-il tout seul, par la force des choses ; il n'y aura plus qu'à cueillir le fruit lorsqu'il sera mûr. Tel est le motif inavoué de la "co-existence" plus ou moins pacifique dans un monde déchiré où règne l'équilibre de la terreur et où des adversaires irréconciliables se tiennent mutuellement en respect. Cette coexistence est évidemment une coexistence sans sympathie, une coexistence où le coeur n'est pas : c'est en vertu de cette tolérance qu'un peuple supporte un autre peuple, qu'un système tolère un autre système ; se jugeant lui-même dirigé dans le sens de la marche et de l'histoire, il pense que sa cause l'emportera fatalement un jour ou l'autre, et qu'il suffit de savoir attendre. A ce point de vue, la tolérance est simplement une tactique qui fait confiance au temps."
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