La poésie que j'aime le plus est depuis longtemps, depuis que j'ai 17 ans je crois, celle d'Apollinaire. Et je ne sais pourquoi mais c'est comme ça. Et de toutes ses poésies celle que j'aime le plus est La Chanson du Mal-aimé. Et j'aime particulièrement ce que Léo Ferré en a fait. Je ne raffole pas toujours de ses arrangements sur Rimbaud et Verlaine, mais Guillaume, il ne l'a pas loupé. Je peux écouter ça en boucle, en transe, tellement ces mots-là je ne sais pourquoi vibrent en moi et ont d'écho, d'écho...
Et je chantais cette romance
En 1903 sans savoir
Que mon amour à la semblance
Du beau Phénix s'il meurt un soir
Le matin voir sa renaissance
Un soir de demi-brume à Londre
Un voyou qui ressemblait à
Mon amour vint à ma rencontre
Et le regard qu'il me jeta
Me fit baisser les yeux de honte
Je suivis ce mauvais garçon
Qui sifflotait mains dans les poches
Nous semblions entre les maisons
Onde ouverte de la mer Rouge
Lui les Hébreux moi Pharaon
Regrets sur quoi l'enfer se fonde
Qu'un ciel d'oubli s'ouvre à mes yeux
Voix lactée ô soeur lumineuse
Des blancs ruisseaux de Chanaan
Et des corps blancs des amoureuses
Nageurs morts suivrons-nous d'ahan
Ton cours vers d'autres nébuleuses
Portez comme un joug le Croissant
Qu'interrogent les astrologues
Je suis le Sultan tout-puissant
Ô mes Cosaques Zaporogues
Votre Seigneur éblouissant
Devenez mes sujets fidèles
Leur avait écrit le Sultan
Ils rirent à cette nouvelle
Et répondirent à l'instant
A la lueur d'une chandelle
réponse des Cosaques Zaporogues au Sultan de Constantinople
Plus criminel que Barrabas
Cornu comme les mauvais anges
Quel Belzébuth es-tu là-bas
Nourri d'immondices et de fange
Nous n'irons pas à tes sabbats
Poisson pourri de Salonique
Long collier des sommeils affreux
D'yeux arrachés à coups de pique
Ta mère fit un pet foireux
Et tu naquis de sa colique
Bourreau de Podolie Amant
Des plaies des ulcères des croûtes
Groin de cochon cul de jument
Tes richesses garde-les toutes
Pour payer tes médicaments
Voie lactée ô soeur lumineuse
Des blancs ruisseaux de Chanaan
Et des corps blancs des amoureuses
Nageurs morts suivrons-nous d'ahan
Ton cours vers d'autres nébuleuses
Douleur qui doubles les destins
La licorne et le capricorne
Mon âme et mon corps incertain
Te fuient ô bûcher divin qui ornent
Des astres des fleurs du matin
Et moi j'ai le coeur aussi gros
Qu'un cul de dame damascène
Ô mon amour je t'aimais trop
Et maintenant j'ai trop de peine
Sept épées de mélancolie
Sans morfil ô claires douleurs
Sont dans mon coeur et la folie
Veut raisonner pour mon malheur
Comment voulez-vous que j'oublie
C'est l'ami aux si douces mains
Dont chaque matin nous sépare
Adieu voilà votre chemin
Les coqs s'épuisaient en fanfares
Juin ton soleil ardente lyre
Brûle mes doigts endoloris
Triste et mélodieux délire
J'erre à travers mon beau Paris
Sans avoir le coeur d'y mourir
Les dimanches s'y éternisent
Et les orgues de Barbarie
Y sanglotent dans les cours grises
Les fleurs aux balcons de Paris
Penchent comme la tour de Pise
Soirs de Paris ivres du gin
Flambant de l'électricité
Les tramways feux verts sur l'échine
Musiquent au long des portées
De rails leur folie de machines
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