Ou quand Mawlana se fâche, ce qui donne, en gros : "Tu ne sais même pas que ta femme est une pute et tu prétends percer les secrets de l'univers ?" Ils sont d'un délicieux, par moment, ces cheikhs...
"Quelqu'un dit : "cet astronome déclare : "Vous prétendez qu'en dehors de ce firmament et de ce globe terrestre que nous voyons, il y a quelque chose. Pour moi, en dehors du visible il n'y a rien ; sinon, montrez-moi où se trouve."
Le Maître répondit : "Cette question est stupide depuis le début ; car tu dis : "Qu'on me montre où cela se trouve. " Or, pour cette chose, il n'y a pas de lieu. Viens, dis-moi d'où provient ton objection et dans quel lieu elle se trouve. Elle n'est pas dans la langue, ni dans la bouche, ni dans la poitrine : fouille partout, réduis ces organes en parcelles ou en atomes, et tu verras que cette objection et cette pensée, tu ne les saisis nullement dans ces organes. Donc, nous savons que ta pensée n'est pas dans un lieu. Lorsque tu ne connais pas le lieu de ta propre pensée, comment connaîtrais-tu le lieu du Créateur de la pensée ?
Des milliers de pensées et d'états d'esprit passent en toi sans que tu interviennes ; ils ne sont ni dans ta possibilité ni dans en toi, et tu n'es conscient ni de leur origine, ni de leur destinée, ni de leur projet. Alors que tu n'es pas capable de connaître tes propres états, de quelle façon peux-tu t'attendre à connaître le Créateur Lui-même ?
Cet homme ignoble dit que dans le ciel Dieu n'est pas. O chien ! Comment sais-tu qu'il n'y est pas ? En vérité, as-tu traversé les étendues du ciel, empan par empan, et tout parcouru, pour rapporter que là Il n'est pas ? Tu as dans ta propre maison une prostituée et tu ne las connais pas comme telle. Comment veux-tu connaître le ciel ?"
Djalâl-ud-Dîn Rûmî, Le Livre du dedans : fihi-mâ-fihi, trad. Vitray-Meyerovitch.
Ouais, bon ... Ca me rappelle Joseph de Maistre, tout ça. Mauvaise foi et utilisation intensive du paradoxe ([...]on se convaincra, avant toute expérience, qu'il ne peut y avoir dans l'univers rien de plus calme, de plus circonspect, de plus humain par nature que le tribunal de l'Inquisition)
RépondreSupprimerA vrai dire l'argument et l'objet de la dispute, je m'en fous. Ce qui m'a amusé c'est le "surveille ta femme au lieu de venir m'emmerder avec tes questions à la con." En général, surtout en occident, ce n'est pas comme ça qu'on présente Mawlana, plutôt grimé en gentil guru new age dégoulinant de tolérance et d'amour universel.
RépondreSupprimerhu hu hu Faut bien comprendre ce bon Memapa, c'est quand même angoissant tout ça, merde, quoi.
RépondreSupprimerCe bon astronome qui comme beaucoup de soit-disants athées ne brûle que d'une chose c'est d'avoir la certitude qu'il s'est trompé ( et comme tous les comptables, il en voudrait pour son argent sans prendre de risque : des preuves matérielles quoi ) finit justement par avoir la certitude qu'il est trompé. Moralité : les petits comptables sont toujours cocus.
Si les théologiens et mystiques de tout poil était des babas-gourous hyper trop cool de la mort, ça se saurait ...
RépondreSupprimerQuand on ne comprend rien à une religion, on est toujours à coté de la plaque ; ça a commencé vers 1820 avec l'hindouisme, ça continue avec l'islam.
ça tombe bien les "baba-gourous hyper trop cool" m'ennuient à mort. Un bon mystique est un tough guy.
RépondreSupprimerJe suppose que 1820 est une allusion à un moment quelconque d'une vogue indianiste en Europe ? Parce que sinon l'hindouisme est connu du monde musulman dès le 8° siècle (II/H), vu que les ghazzis turcs n'ont cessé d'y lancer leur Jihad jusqu'à Babûr.
Par ailleurs je ne vois pas qu'ici le christianisme soit davantage connu. Il y a même une méconnaissance assez effrayante, bien que tout le monde pleurniche sur l'héritage judéo-chrétien" soit pour en dire du mal, soit pour le regretter, mais en l'ignorant de même.
Oui, en (très) gros, 1820, c'est le début de la vogue des hindouisteries en Europe.
RépondreSupprimerQuand au christianisme, même du temps de sa splendeur, il ne donnait du bon temps qu'aux théologiens (sauf peut-etre vers le IVeme siècle). La foi du charbonnier, c'est la foi du charbonnier... Pas besoin de connaitre le canon pour être croyant. Alors quand la dite foi se barre en couille ...
"Quand au christianisme, même du temps de sa splendeur, il ne donnait du bon temps qu'aux théologiens (sauf peut-etre vers le IVeme siècle)."
RépondreSupprimerarf, bien sûr ! Après le IV° siècle, il n'y a eu aucune spiritualité chrétienne, ni d'arts chrétiens, ni de littérature chrétienne, ni de musique chrétienne, ni de moralisme chrétien, rien qui donnait du plaisir aux gens, sauf chez les théologiens et les masochistes, c'est bien connu...
C'est bien ce que je dis : je déplore souvent qu'on raconte n'importe quoi sur l'islam, n'importe quoi sur le Moyen-âge, mais le christianisme n'est pas mieux loti.
Non, ce que je voulais dire par là, ce qu'à cette l'époque riche en hérésies, les gens, même du commun (comme on dit) se passionnaient pour les points de doctrine, et que par conséquent, on peut supposer qu'ils connaissaient un peu leur domaine (c'est le sens de il ne donnait du bon temps qu'aux théologiens (sauf peut-etre vers le IVeme siècle)). Question de maitrise du canon, c'est tout.
RépondreSupprimerPour le reste, bien sûr qu'il n'y pas eu qu'un tunnel de plusieurs siècles jusqu'aux encyclopédistes.
Le 4° siècle est l'époque où le dogme se fixe. Il est moins riche en hérésies qu'en controverses doctrinales. L'arianisme, le nestorianisme, le marcionisme, sont devenus hérésies après coup. D'abord il y a querelle, puis concile, puis on tranche sur un point dogmatique et c'est seulement après que les théories condamnées sont assimilées à des hérésies.
RépondreSupprimerMais cela justement ne concernait pas le commun, qui était plutôt occupés à se taper dessus pour les grosses controverses bien lourdingues : chrétiens contre juifs, paîens contre chrétiens, chrétiens contre manichéens, etc, sans compter les juifs contre les chrétiens.
Au contraire, dès l'époque médiévale, fleurissent les hérésies pour lesquelles toute une population peut se passionner et est même prête à mourir : en vrac, et sans même parler du schisme avec l'église grecque,les Ariens, les pélagistes, les pauliciens, les Bogomiles, les Cathares, les Dolciniens, les Vaudois, les frères et soeur du Libre Esprit, les Protestants et toutes leurs sectes, les courants anglicans et puritains, les Jansénistes, et même les Francs-Maçons, liste non exhaustive qui ne concerne en plus que le christianisme latin.
En Orient il suffit de voir même aujourd'hui les 36000 divisions des églises orientales pour se rendre qu'en Occident on est de petits amateurs en schismes.
Non, on s'est toujours passionné pour des points de doctrines, même dans le petit peuple, tant que ce dernier était profondément religieux et que sa vie quotidienne baignait dans une culture religieuse du soir au matin. La "foi du charbonnier" est une notion dont je me méfie, c'est une valeur mise en avant par la Contre Réforme justement à l'encontre des hérésies populaires et surtout de la diffusion prônée de la culture religieuse livresque parmi le peuple. Je ne suis pas sûre que socialement et historiquement elle ait jamais été pertinente.
Tiens, c'est étrange. Il me semble que Gibbon dans Decline and fall raconte, d'un ton caustique, les pinailleries interminables sur des points de doctrine obscurs vers cette époque là. Evidemment, vu la taille du bouquin, hors de question d'aller chercher les références.
RépondreSupprimerPour ce qui est de la foi du charbonnier, je n'en sais trop rien. Disons que les catholiques que je rencontre de nos jours ne m'éblouissent pas par leur connaissance des textes (et ne m'éblouissent pas des masses, en général, d'ailleurs), alors, que de plus en plus minoritaires, ils devraient être plus "conscientisés" puisque leur religion est un choix (et pas un simple suivisme).
Naturellement que les pinailleries ont commencé sous Constantin. Il y a pinailleries, concile, dogme, et donc hérésies. Mais ça n'a fait que s'amplifier après, les fameuses "querelles byzantines" en Orient et les hérésies populaires messianiques ou gnostiques du moyen-âge occidental.
RépondreSupprimerSur l'ignorance des catholiques, c'est ce que je disais : "Par ailleurs je ne vois pas qu'ici le christianisme soit davantage connu. Il y a même une méconnaissance assez effrayante, bien que tout le monde pleurniche sur l'héritage judéo-chrétien" soit pour en dire du mal, soit pour le regretter, mais en l'ignorant de même."
En général, que ce soit du côté des athées (quand ils se mêlent de religion) ou des catholiques (quand ils veulent se défendre), le niveau historique et théologique est nul.