Je possède maintenant l'intégrale des cantates religieuses de Bach par Harnoncourt et Leonhardt. Boucle bouclée. Ce qui est curieux, c'est que plus je m'attache à Bach, plus je me désintéresse de beaucoup de musiques anciennes et baroques que j'avais aimées avant… Harnoncourt et Leonhardt écrasant Christie.
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Une Séparation, d'Asghar Farhadi. Au début, cela m'ennuie. Et puis, comme pour À propos d'Elly, l'histoire finit par m'accrocher. Comme dans Elly, tous les personnages sont équitablement pitoyables ou crispants, à leurs moments.
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Et voilà : le docteur Jivago est mort. Maintenant, je relis La Conscience de Zéno, livre toujours associé, dans ma mémoire, à la chambre d'hôtel de Sivas où je l'avais lu pour la première fois.
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Filet de porc à la cévenole : olives vertes, vin blanc et marrons.
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Journée 'J'attends le Plombier', puisque ma chaudière fait sa crise cardiaque annuelle. L'année dernière, c'était très exactement le 28 novembre au soir, vêpres de l'Avent. Cette fois, elle est en avance sur l'année liturgique. Le plus drôle est la tête du plombier quand, me demandant la date de la dernière panne, j'ai pu lui donner exactement les jours et heures de la panne et de ses multiples interventions. Les archives redoutables des diaristes…
En attendant, à devoir chauffer de l'eau pour tout, j'ai l'impression de squatter la maison des Ingalls.
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Gosse, me fascinait le coutelas de Rahan. Non pas comme une arme, mais quand, à la fin, il le faisait tourner sur une pierre et choisissait de partir dans la direction pointée. Me paraissait merveilleux ce chemin donné par le hasard, et surtout, sans lui, comment prendre une direction plutôt qu'une autre, alors que tous les choix possibles s'offrent, affolants ?
Est-ce que certaines choses sont écrites, certaines trajectoires tirées d'avance, ou est-ce qu'à chaque pas, nous avons le choix ? Qu'est-ce qui est écrit, qu'est-ce qui ne l'est pas ? Qu'est-ce qui est voulu, qu'est-ce qui ne l'est pas ? Et comment discerner, comment reconnaître la trajectoire essentielle des méandres mineures ?
À quoi cela sert-il de dire : "Que Ta volonté soit faite" si, à tout moment, nous sommes libres ? Veux-Tu que je veuille ce que Tu veux, mais sans me le dire _ auquel cas ce ne serait qu'un désir de Ta part, que je satisferais sans le savoir ? _ et ainsi me donnant librement ; sinon, sachant ce que Toi, Tu veux, j'opterais uniquement en me disant que c'est ça, ce qu'il faut faire, bon gré mal gré.
Comment faire Ta volonté en restant libre, si ce n'est en ignorant quelle est Ta volonté ? C'est peut-être pour cela que Tu n'aimes pas qu'on T'en demande, des signes : on se fait traiter d'engeance de vipère et autres noms charmants… Et cela vient peut-être de là, cette histoire de fruit maudit, d'omniscience funeste à dérober. Il y a des connaissances qui emprisonnent.
Je n'ai jamais cessé d'utiliser, avec un jeu ou un autre, le couteau d'ivoire, car je voudrais tellement apprendre à voir, à sentir le vent… et au moment où je saurai tout, sans faute, j'aurais peut-être perdu le libre don.