dimanche 17 octobre 2004

Intervention divine



J'ai bien aimé ce film. Il est provocant, léger, et moqueur. A côté de cette pléthore de mots, de fureurs, d'émotions, que suscite ce conflit dont tout le modne se mêle et sans finalement y connaître grand-chose, le silence de ce film, muet aux trois-quarts, est reposant. Il y a aussi une élégance détachée dans ce silence, dans le visage impassible de Suleiman, de son amante, une élégance comme une arme de guerre lorsqu'il s'agit de foudroyer un barrage d'un seul regard, ou bien de faire exploser un char avec un noyau de fruit jeté si négligemment, en toute innocence, derrière soi. A côté, les Israéliens apparaissent vulgaires et, il faut le dire, un peu cons. Mais on ne voit d'eux que la soldatesque, des soldats neuneus ou prêts à péter les plomb dans leur check-point. Partialité ? Oui, si l'on veut, (après tout peut-on demander à un occupé de compatir psychologiquement à la misère de l'occupant...) mais surtout justesse de vue, car dans une occupation, tout ce que l'on voit, que l'on connait de l'ennemi, c'est ce soldat-gendarme encore plus empêtré dans sa peur et sa consigne que les Palestiniens dans leurs chek-point. L'élégance ironique de jouer avec toutes les peurs que l'on suscite : le ballon rouge et grimaçant à l'effigie d'Arafat, qui affole le barrage, survole la ville, et va se fixer au dessus du Dôme du Rocher : bouh ! la menace arabe... la carte de la Palestine qui sert de bouclier à l'héroïne en panoplie de kamikaze, dans une scène désopilante à la Jackie Chan. La scène du feu rouge avec l'Israélien à tête de beauf, il faut dire, drapeau sur sa voiture et kipa sur le crâne, et l'autre qui met ses lunettes noires et en rajoute dans le bouh je te jette un sort ! et le regard des deux conducteurs par delà leur vitre, et aucun ne veut redémarrer et céder, et la file de voitures derrière, bloquée comme toute la diplomatie internationale par ce micro-conflit dans un territoire de poche. Le jeu des mains dans la voiture, (qui ne s'arrête pas aux mains d'ailleurs, j'en sais quelque chose, jeux de mains, jeux de tigers, le tout est d'avoir l'air innocent, impassible, jeux d'amoureux traqués par les yeux...) .

ça peut énerver. Parce que c'est un pied de nez, pas un machin larmoyant et politiquement correcte sur la paix et la fraternité et soyons tous de bonne volonté... Mais la moquerie c'est de bonne guerre en temps de guerre. Surtout quand la plaisanterie est fine.

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Dans la vie on prend toujours le mauvais chemin au bon moment. Dany Laferrière.